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Travaux mal réalisés : prescription et garantie décennale.

Le 16 janvier 2025
Travaux mal réalisés : prescription et garantie décennale.
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1. Résumé succinct
Contexte :
Le litige porte sur des désordres survenus après des travaux de réparation entrepris dans un immeuble. Ces désordres concernent principalement un affaissement des fondations lié à la nature du sol. Les consorts Z... ont mis en cause la société AMC (assureur dommages-ouvrage), la société Eurisk (expert mandaté), et la société CEBTP-Solen (société géotechnique), arguant de manquements dans l'évaluation des risques et la mise en œuvre de travaux efficaces et pérennes.

Impact principal :
La Cour de cassation précise que la réparation préconisée par les intervenants doit être efficace et pérenne. En l’absence de telles garanties, les désordres ultérieurs sont couverts par la garantie décennale, et le délai de prescription de l’action ne commence pas à courir tant que la réparation initiale n’a pas atteint son objectif.


2. Analyse détaillée
Les faits
En 1997, un premier sinistre est constaté (affaissement des sols), et des travaux sont financés par la société AMC.
En 2002, de nouveaux désordres apparaissent, affectant les murs périphériques de l’immeuble.
Les consorts Z... assignent la société AMC, la société Eurisk, et la société CEBTP-Solen, arguant que les travaux de 1997 étaient insuffisants et que les désordres auraient pu être évités avec une meilleure évaluation des risques.

La procédure
Première instance :
Les consorts Z... obtiennent gain de cause ; les sociétés AMC, Eurisk, et CEBTP-Solen sont condamnées solidairement à indemniser les dommages.
Cour d’appel :
La cour confirme la condamnation, considérant que les travaux de 1997 étaient insuffisants et que les désordres postérieurs étaient prévisibles et auraient pu être évités.
Pourvoi en cassation :
La société AMC et d’autres parties contestent la décision, soutenant notamment que le délai de prescription avait expiré.

Contenu de la décision
Arguments des parties :

Les consorts Z... : estiment que les désordres postérieurs résultent de travaux insuffisants en 1997, rendant leur réparation non pérenne.
La société AMC : argue que les nouveaux désordres ne relèvent pas de la garantie décennale, car ils sont apparus après le délai d'épreuve de dix ans.


Raisonnement juridique de la Cour de cassation :

Réparation non pérenne : La Cour rappelle que l’obligation de réparation impose des travaux pérennes et efficaces pour prévenir toute aggravation des désordres. Si cette condition n’est pas remplie, le délai de prescription ne peut commencer à courir.

Lien de causalité : La Cour considère que les désordres de 2002 sont directement liés à l’insuffisance des travaux de 1997, rendant les intervenants responsables de ces nouveaux désordres.

Solution retenue :
La Cour de cassation casse partiellement la décision de la cour d’appel, précisant que le délai de prescription ne commence pas à courir tant que la réparation n’est pas pérenne et que les travaux ne remplissent pas leur objectif.

3. Références et articles juridiques
Décision principale :
Cass. civ. 3e, 22 juin 2011, n° 10-16.308.
Textes juridiques cités :

Article L. 242-1 du Code des assurances : Garantie dommages-ouvrage et obligation de financer des travaux efficaces.
Article 1792 du Code civil : Responsabilité des constructeurs et garantie décennale.

4. Analyse juridique approfondie

Délai de prescription et efficacité des travaux
La Cour de cassation affirme que le délai de prescription décennale ne court pas lorsque :

Les travaux de réparation sont manifestement insuffisants.

La réparation n’est pas pérenne et entraîne des désordres prévisibles.

Cette position renforce la protection des maîtres d’ouvrage contre les manquements des intervenants en charge des réparations.


Conséquences juridiques

Impact sur la jurisprudence :
Cette décision s’inscrit dans une ligne jurisprudentielle exigeant des travaux de reprise qu’ils soient pérennes et adaptés.

Évolution des pratiques :

Les intervenants doivent prévoir les risques futurs, même au-delà du délai décennal.
Les experts techniques ont une obligation renforcée de conseil et doivent considérer l’impact potentiel des caractéristiques du sol.

5. Critique des sources et décisions postérieures

Plusieurs décisions postérieures au 22 juin 2011 ont traité des désordres survenus après des travaux mal réalisés, en mettant en évidence les obligations des constructeurs et des assureurs en matière de réparation efficace et pérenne. Voici quelques arrêts significatifs :

Cour de cassation, 3ᵉ chambre civile, 15 juin 2017, n° 16-17.811 :

Faits : Des fissures sont apparues dans une maison malgré des travaux de confortement effectués.
Décision : La Cour a jugé que, en l'absence de lien de causalité entre les travaux de reprise inefficaces et les désordres qu'ils devaient corriger, la responsabilité de plein droit des constructeurs n'était pas engagée. 


Cour de cassation, 3ᵉ chambre civile, 13 juin 2019, n° 18-16.725 :

Faits : Des désordres sont survenus après l'installation d'une véranda.
Décision : La Cour a retenu que, les désordres n'étant pas imputables aux travaux réalisés sans malfaçon par l'entreprise, la présomption de responsabilité décennale ne s'appliquait pas.

Ces décisions illustrent l'importance d'une réparation efficace et pérenne des désordres en matière de construction, ainsi que les conditions d'engagement de la responsabilité des constructeurs et des assureurs.

 6. Accompagnement juridique
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