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Forclusion des cautions : la Cour de cassation clarifie les délais contractuels

Le 13 mai 2016
Forclusion des cautions : la Cour de cassation clarifie les délais contractuels
caution solidaire – délai de forclusion – délai de prescription – clause contractuelle – Cour de cassation – Banque européenne crédit mutuel – Innovimmo – droit bancaire – action en paiement – procédure collective

1. Résumé succinct

Contexte :
Le litige oppose la Banque européenne de crédit mutuel à M. X…, caution solidaire d’un prêt consenti à la société Innovimmo. La clause contractuelle prolongeait de deux ans le délai pour engager une action contre la caution. La banque a agi en 2011, bien après l’échéance initiale en 2008. M. X… a soulevé la forclusion de son engagement.

Impact principal :
La Cour de cassation, en requalifiant le délai prévu par la clause comme une forclusion (et non une prescription), déclare irrecevable l’action tardive de la banque. Cette décision fixe une distinction importante entre prescription et forclusion dans les relations contractuelles.


2. Analyse détaillée

Les faits
Parties impliquées :Demanderesse : Banque européenne de crédit mutuel (anciennement Banque de l'économie, du commerce et de la monétique).
Défendeur : M. X…, caution solidaire du prêt accordé à la société Innovimmo.

Nature du litige :
En 2004, la banque consent deux prêts à la société Innovimmo, avec échéance au 30 septembre 2006. La caution s’engage pour la durée des prêts, prolongée de deux ans (jusqu’au 30 septembre 2008). En 2011, la banque initie une saisie des rémunérations de la caution, contestée pour forclusion.

La procédure
Cour d'appel de Lyon (19 juin 2014) :La Cour estime que le délai de deux ans constitue une prescription et considère l’action de la banque comme valable, en raison de l’interruption de la prescription liée à la procédure collective de la société Innovimmo.
Cour de cassation :Requalification du délai en forclusion, rendant toute interruption impossible. La décision d’appel est cassée sans renvoi.


Contenu de la décision
Arguments des parties :

Banque : La déclaration de créance dans la procédure collective interrompt le délai, qui est une prescription.
Caution : Le délai est une forclusion, ne pouvant être interrompu.

Raisonnement juridique :La clause contractuelle établissant un terme au droit d’agir de la banque constitue un délai de forclusion.
La déclaration de créance dans la procédure collective n’a aucun effet sur ce délai.

Solution retenue :Cassation de la décision d’appel, et déclaration de la banque forclose en sa demande contre la caution.

3. Références et articles juridiques
Décision analysée :
Cass. com., 26 janv. 2016, n° 14-23.285, ECLI:FR:CCASS:2016:CO00090
Lien vers la décision officielle sur Légifrance.
Articles cités :

Article 1134 du Code civil (ancien) : Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Article 2246 du Code civil (ancien) : L’interpellation faite au débiteur interrompt la prescription.

4. Analyse juridique approfondie

Raisonnement juridique

Requalification du délai :

Le délai de deux ans prévu dans la clause contractuelle n’est pas une prescription mais une forclusion, c’est-à-dire une limite absolue au droit d’agir.
Les parties ne peuvent pas prévoir de suspension ou d’interruption d’un délai de forclusion.

Impact de la procédure collective :

Contrairement à une prescription, le délai de forclusion n’est pas affecté par des actes interruptifs, comme la déclaration de créance au passif de la société Innovimmo.

Conséquences juridiques

Pour la jurisprudence : Cette décision clarifie la distinction entre délai de prescription et délai de forclusion.

Pour les pratiques : Les banques et créanciers devront être attentifs à respecter les délais de forclusion dans leurs contrats.

5. Critique des sources et de la décision
Points controversés

La rigidité des délais de forclusion peut paraître inéquitable, notamment lorsque des actes interrompant la prescription sont réalisés.
Une rédaction plus précise des clauses contractuelles aurait pu éviter le litige.


6. Accompagnement juridique
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Cass com 26 janvier 2016 n°14-23.285

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