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Licenciement sans lettre : la Cour de cassation encadre strictement la preuve

Le 14 avril 2025
Licenciement sans lettre : la Cour de cassation encadre strictement la preuve
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1. Résumé succinct

Contexte :
Le litige oppose la société Automobiles JM à son ancien directeur général, M. [J], licencié pour faute grave le 28 février 2019. Ce dernier conteste le licenciement devant les juridictions prud’homales.

Objet du pourvoi :
La Cour de cassation casse partiellement l’arrêt d’appel ayant retenu un licenciement verbal à partir d’un échange de courriels internes, au motif que la volonté de l’employeur de rompre le contrat n’avait pas été manifestée au salarié ni publiquement.

Impact principal :
Rappel des exigences de l’article L. 1232-6 du Code du travail : en l’absence de lettre de licenciement, la rupture du contrat ne peut résulter que d’un acte de l’employeur manifesté au salarié ou publiquement.


2. Analyse détaillée
Les faits
M. [J] est embauché comme directeur général par la société Holding JVM le 13 novembre 2017, contrat transféré à la société Automobiles JM.
Il est licencié pour faute grave le 28 février 2019.
Il saisit la juridiction prud’homale.
En 2024, un redressement judiciaire est ouvert au profit de l’employeur.

La procédure
TA : Jugement du conseil de prud’hommes non détaillé.
CA Besançon, 26 sept. 2023 : considère que le licenciement était verbal car l’employeur avait déjà établi une promesse d’embauche pour son remplaçant avant d'engager la procédure de licenciement.
Pourvoi formé par la société et les organes de la procédure collective.
Cour de cassation (Cass. soc., 26 mars 2025) : casse partiellement la décision.

Contenu de la décision
Arguments des parties
Employeur : conteste la recevabilité de courriels professionnels internes comme preuve ; absence de manifestation publique ou au salarié de la volonté de rompre le contrat.
Salarié : invoque les échanges préparatoires au recrutement de son remplaçant comme preuve d’un licenciement verbal.

Raisonnement juridique
Cour d’appel : retient que les courriels montrent une volonté irrévocable de rupture dès le 24 janvier 2019, soit avant la convocation à l’entretien préalable.


Cour de cassation :

Se fonde sur l’article L. 1232-6 du Code du travail.
Rappelle qu’en l’absence de lettre, la rupture doit être manifestée au salarié ou publiquement.
Or ici, les courriels étaient internes (entre le président et la RH), non adressés au salarié ni rendus publics.
L’intention, aussi claire soit-elle, ne suffisait pas juridiquement à caractériser une rupture.

Solution retenue
Cassation partielle : la décision est cassée sauf sur les points suivants :

Rejet de la demande de rejet des pièces n°54, 29 et 78 ;
Condamnation à payer une rémunération variable et congés payés afférents.

3. Références et textes juridiques
Référence officielle :
Cass. soc., 26 mars 2025, n° 23-23.625

Texte cité :
Article L. 1232-6 du Code du travail :

« La rupture du contrat de travail ne peut être notifiée que par lettre recommandée avec avis de réception. »

 Jurisprudence rapprochée :

Cass. soc., 19 oct. 2011, n° 10-17.337, Bull. 2011, V, n° 237 – rejet : même exigence sur la manifestation de la volonté de rupture.

4. Analyse juridique approfondie

Portée du raisonnement
La Cour protège le salarié contre les ruptures implicites ou dissimulées, même si des préparatifs sont engagés.
Elle renforce la portée formelle de la lettre de licenciement, pierre angulaire de la procédure.

Conséquences juridiques
Inopposabilité au salarié de décisions internes non portées à sa connaissance.
Toute promesse d’embauche pour un successeur n’équivaut pas à un acte de rupture si elle n’est pas notifiée ou rendue publique.

 5. Critique de la décision :

Confirmation du principe selon lequel la manifestation de volonté unilatérale de rupture doit être explicite, publique ou adressée au salarié, et non simplement interne.

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