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Filiation internationale : limites de l'exequatur et effets juridiques clarifiés

Le 21 janvier 2025
Filiation internationale : limites de l'exequatur et effets juridiques clarifiés
Exequatur jugement étranger - Filiation internationale - Gestation pour autrui France - Adoption plénière - Reconnaissance de filiation - Droit international privé

Le 2 octobre 2024, la Cour de cassation (pourvoi n° 23-50.002) a rendu une décision marquante concernant la reconnaissance des filiations établies à l’étranger et les effets juridiques d’un exequatur en droit français. Cette décision apporte des précisions sur les limites de l’interprétation des jugements étrangers dans le cadre du droit de la famille.


Les faits


MM. [N] et [P], mariés en 2017, avaient obtenu un jugement de filiation prénatal de la Cour supérieure de Californie en 2019. Ce jugement les reconnaissait comme parents légaux d’un enfant né par gestation pour autrui (GPA), écartant toute présomption de parentalité à l’égard de la mère porteuse et de son époux.

La Cour d’appel de Paris avait accordé l’exequatur à ce jugement, permettant sa reconnaissance en France. Toutefois, les requérants avaient demandé à ce que cette reconnaissance produise les effets d’une adoption plénière. La cour d’appel avait accédé à cette demande, décision contestée par le procureur général devant la Cour de cassation.


Le raisonnement de la Cour de cassation

Limites de l’exequatur : La Cour a rappelé que l’article 509 du code de procédure civile interdit au juge de réviser le fond d’un jugement étranger lors de son exequatur. En l’espèce, le jugement étranger établissait uniquement un lien de filiation et non une adoption plénière. L’exequatur ne pouvait donc conférer des effets juridiques non prévus dans le jugement initial.

Effets limités de la filiation : La Cour a considéré que la reconnaissance de la filiation étrangère devait produire en France uniquement les effets prévus par la loi applicable à chacun de ces effets, sans interprétation extensive.

Interdiction de requalification : La décision de la cour d’appel de transformer une filiation reconnue en adoption plénière constituait une révision prohibée, violant les principes de souveraineté et de respect des compétences juridictionnelles.

Conséquences juridiques

Encadrement strict de l’exequatur : Cette décision réaffirme que l’exequatur a pour objectif d’assurer la reconnaissance des jugements étrangers sans en modifier la portée ni les requalifier.


Protection du droit de la famille français : Elle préserve les spécificités du droit français, notamment en matière de GPA et d’adoption, en empêchant l’importation de concepts étrangers incompatibles avec les principes juridiques nationaux.


Clarification pour les familles internationales : Les familles sollicitant l’exequatur doivent prévoir que seuls les effets expressément prévus dans le jugement étranger seront reconnus en France.

Conclusion
Cette affaire souligne l’importance de respecter les frontières entre les systèmes juridiques dans un contexte de droit international privé. Les jugements étrangers relatifs à l’état des personnes doivent être appliqués avec rigueur, sans dénaturer leur contenu d’origine.

cass 1ere civ 2 oct 2024 n°23.50.002

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