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Parasitisme économique et concurrence déloyale : arrêt Cour de cassation 2024

Le 08 octobre 2024
Parasitisme économique et concurrence déloyale : arrêt Cour de cassation 2024
CONCURRENCE DELOYALE OU ILLICITE - Concurrence déloyale - Faute - Parasitisme - Conditions – Détermination - Valeur économique individualisée - article 1240 du code civil - sillage d’un concurrent afin de tirer profit de ses efforts -

Résumé succinct de la décision

Dans son arrêt du 26 juin 2024 (Cass. com. 26 juin 2024, n°22-17.647), la Cour de cassation a confirmé la condamnation des sociétés Phoenix et Intersport pour parasitisme économique au détriment de Decathlon. Elle a jugé que la commercialisation d’un produit imitant de manière déloyale le masque subaquatique « Easybreath » de Decathlon constituait une faute au sens de l’article 1240 du Code civil.


Rappel exhaustif des faits et de la procédure

Faits

Decathlon SE et Decathlon France ont conçu et commercialisé le masque subaquatique « Easybreath », bénéficiant d’un modèle communautaire enregistré, d’un travail de conception et de développement de trois ans (coût de 350 000 €) et de lourds investissements publicitaires (plus de 3 millions d’euros).
Intersport France, en collaboration avec Phoenix Group, a commercialisé un masque similaire nommé « Tecnopro » en 2017, sans justifier d’investissements en conception ou promotion.

Procédure
Cour d'appel de Paris (28 janvier 2022) :Les sociétés Decathlon ont obtenu gain de cause sur le fondement du parasitisme économique. Phoenix et Intersport ont été condamnées à payer 100 000 € en réparation.

Pourvoi en cassation :Les sociétés Phoenix et Intersport ont contesté la décision, invoquant notamment l’absence de copie illicite et le respect des principes de libre concurrence.

Articles évoqués et leur contenu

Article 1240 du Code civil : "Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer." URL : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006441845/

Jurisprudence pertinente :

Com., 16 février 2022, pourvoi n°20-13.542 : Définition du parasitisme économique comme la captation indue d’une valeur économique. URL : https://www.courdecassation.fr/jurisprudence?decision=20-13.542

Raisonnement de la Cour de cassation

Définition et critères du parasitisme économique :Le parasitisme consiste à tirer profit des efforts, du savoir-faire et des investissements d’un concurrent sans prendre de risques ni fournir de contrepartie.
La victime doit démontrer une valeur économique individualisée et l’intention du tiers de se placer dans son sillage.

Application au cas d’espèce :

Decathlon a prouvé que le masque « Easybreath » constituait une valeur économique identifiable, fruit d’efforts d’innovation, de conception et d’investissements publicitaires.

Phoenix et Intersport ont commercialisé un produit similaire, fortement inspiré, sans investissements propres, à une période où Decathlon poursuivait la promotion de son produit.


Rejet des arguments des pourvois :

La Cour a écarté l’invocation de la libre concurrence, estimant que les actes incriminés dépassaient les usages loyaux du commerce.

Elle a confirmé que le comportement des sociétés Phoenix et Intersport relevait d’un parasitisme caractérisé.

Conséquences juridiques

Renforcement de la protection contre le parasitisme :

Cet arrêt clarifie que des efforts significatifs et identifiables dans le développement d’un produit sont protégés contre une captation indue par des concurrents.

Limites à la libre concurrence :

La reprise des caractéristiques fonctionnelles d’un produit concurrent n’est pas fautive en soi, mais la combinaison d’une imitation délibérée et d’une absence de prise de risque économique constitue une faute.


Évolution de la jurisprudence :

Antécédents :Com., 16 février 2022, pourvoi n°20-13.542 : La captation d’investissements concurrentiels constitue une faute.
L’arrêt de 2024 renforce ces principes en soulignant l’importance des preuves de captation déloyale.

Référence à la décision
Texte complet : Cass. com. 26 juin 2024, n°22-17.647

 Cass com 26 juin 2024 n°22-17.647

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